Nota
– mars 2023 : rédaction de l’article et illustrations
– juillet 2023 : mise à jour de la cartographie
Toulouse Space Team fait le point au 31/03/2023
Découvrez les derniers chiffres clefs de l'industrie du NewSpace français établis par Toulouse Space Team :
- 67 entreprises
- 2 300 emplois (soit 7% des effectifs de l’emploi spatial hexagonal)
- 47 créations d'entreprises sur les 5 dernières années
- 85% de petites et moyennes entreprises
- 422 millions d'euros de levées de fonds entre 2018 et 2022
Avec cette nouvelle mise à jour de sa cartographie des industriels du NewSpace français, Toulouse Space Team fait le point sur les derniers indicateurs et dynamiques d’évolution de la filière. Emplois, créations d’entreprises, levées de fonds, mouvements de structuration de l’écosystème : tout est passé au crible et mis en perspective sur la base des derniers travaux de ces spécialistes du NewSpace basés en région toulousaine.
1- Qu’entendons-nous par « NewSpace » ?
Cinq éléments de caractérisation clefs...
– L’utilisation d’innovations d’usage ou de technologies de rupture ou le recours à des méthodes et process innovants de fabrication ;
– L’introduction de modèles d’affaires reposant notamment sur une réduction des coûts et une plus forte acceptation des risques ;
– L’ouverture à des financements privés pour son développement ;
– Le redéploiement de la chaîne de valeur des activités spatiales en direction de marchés prioritairement axés sur la commercialisation de services ;
– Une date de création récente qui définit la notion de start-up ou une entreprise plus établie ayant fait évoluer son modèle d’affaires vers le NewSpace pour une partie plus ou moins significative de ses activités.
...auxquels seule une partie des acteurs de la chaîne de valeur nous semble répondre
Sur la base de nos constatations, nous considérons que ne répondent réellement à ces cinq éléments de caractérisation que les industriels directement en prise avec les technologies développées, depuis les fabricants de satellites jusqu’à ceux qui les opèrent. En effet, la révolution introduite par le NewSpace nous semble s’être exclusivement concentrée sur des développements (technologiques, industriels, applicatifs) portés par l’amont de la filière, au bénéfice d’un secteur aval qui ne fait qu’en exploiter les bénéfices pour ses activités. De surcroît, nous ne considérons pas une grande majorité d’acteurs de cette portion aval comme de purs acteurs du secteur spatial et plus encore du NewSpace, la donnée spatiale ne constituant pour eux qu’une commodité parmi d’autres. Cette vision est d’ailleurs cohérente avec celle présentée dans l’étude INSEE à laquelle nous faisons référence ci-après, qui ne recense en France qu’un nombre limité de purs acteurs du secteur spatial.
Cartographie du NewSpace français par Toulouse Space Team
2. Quels indicateurs et caractéristiques clefs pour le NewSpace français en 2023 ?
Le NewSpace : 7% des effectifs de l’emploi spatial hexagonal
Sur la base de la définition ci-dessus, nous estimons que le NewSpace hexagonal représente à ce jour près de 2 300 emplois répartis au sein de 67 entreprises. Si l’on se réfère à la dernière étude de l’INSEE consacrée à l’emploi dans le secteur spatial en France publiée en septembre 2022, ce chiffre représenterait un peu moins de 7% des effectifs du secteur spatial français. L’INSEE estime dans cette étude que le spatial représente 33 200 emplois (répartis au sein de quelque 1 700 entreprises pour un chiffre d’affaires de 10,8 milliards d’euros).
Si près des deux tiers de ces emplois sont concentrés dans les activités de fabrication de satellites et de fourniture d’équipements, il convient de souligner la grande diversité des métiers qui y sont représentés, depuis la fabrication de satellites (Hemeria, U-Space…) et d’équipements/sous-systèmes associés (Anywaves, Exotrail…) jusqu’à l’exploitation de systèmes satellitaires (Kinéis, Prométhée, Loft Orbital, Unseenlabs…) en passant par les lanceurs (Latitude, Maiaspace, Spark Orbital…) et le segment sol (CS). Ainsi, au-delà même du nombre de ses acteurs, la chaîne de valeur du NewSpace hexagonal apparaît particulièrement complète, couvrant l’ensemble des briques de compétences nécessaires à la réalisation d’un projet spatial.
Il apparaît par ailleurs qu’une part prédominante (85%) des effectifs rattachables au NewSpace hexagonal se trouve concentrée dans des petites et moyennes entreprises. Toutefois, il convient de préciser que cela n’empêche pas le maintien au sein de cette filière d’un certain nombre d’acteurs établis de taille plus importante (ETI ou grandes entreprises) ayant progressivement migré au cours des dernières années vers le NewSpace pour une partie de plus en plus significative de leur activité.
On note également l’apparition de nouveaux secteurs prospectifs comme la fourniture de services en orbite, les ballons haute altitude ou encore les activités liées à la surveillance de l’espace, ainsi que la création récente d’un nombre importants de start-ups fournissant des services de lancement pour petits satellites. Enfin, il convient de mentionner qu’un nombre croissant d’entreprises (certes encore peu nombreuses) élargissent leur portefeuille d’activités par voie de verticalisation.
Des créations d’entreprises en constante augmentation depuis cinq ans
En lien avec les tendances relevées ci-dessus, les créations d’entreprises liées au NewSpace hexagonal poursuivent une courbe ascendante, et ce plus particulièrement au cours des cinq dernières années. Ainsi, pas moins de 46 entreprises, représentant près de 800 emplois, ont vu le jour entre 2018 et 2022 (soit une moyenne de neuf entreprises créées par an), preuve d’un indéniable dynamisme entrepreneurial.
Date de création des entreprises du NewSpace français
Même si l’on peut raisonnablement anticiper que les années à venir devraient engendrer d’importants mouvements de consolidation (dont certains sont d’ailleurs en cours), il convient de mentionner que ce dynamisme entrepreneurial est également générateur d’un important effet d’attractivité qui déborde largement nos frontières. Ainsi, plusieurs acteurs étrangers de renom (parmi lesquels Aerospacelab, Aiko, E-Space, Endurosat, GomSpace, Loft Orbital ou encore Pangea Aerospace) ont choisi de s’implanter en France pour y développer leurs activités, avec une claire préférence donnée à la région toulousaine.
Récentes pour la plupart, ces implantations restent encore peu dimensionnantes au moment où nous écrivons ces lignes, à l’exception notable de celle réalisée par Loft Orbital. A peine trois ans après son installation dans la Ville Rose, Loft Orbital dispose déjà d’un effectif (en progression constante) de plus de 50 personnes, fait partie des entreprises du Next40 et a renouvelé en janvier 2023 sa précédente commande auprès d’Airbus Defense & Space pour 15 plateformes d’orbite basse supplémentaires dérivées de la plateforme Arrow qui équipe la constellation OneWeb.
Dynamiques régionales : un clair duopole Ile-de-France/Occitanie
Les emplois et entreprises liés au NewSpace hexagonal sont pour l’essentiel tirés par les deux régions traditionnellement en pointe et les plus solidement dotées en termes d’écosystème spatial que sont l’Ile-de-France et l’Occitanie. Suivent (bien que de beaucoup plus loin) les régions Nouvelle-Aquitaine, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Grand-Est et Bretagne. A noter par ailleurs que plusieurs des entreprises du NewSpace hexagonal (on pense notamment à Exotrail ou encore à Syrlinks) ont ces dernières années déployé une stratégie de diversification en région, avec, là encore, un focus sur la région toulousaine dans l’objectif de se rapprocher des grands donneurs d’ordres et partenaires industriels (Airbus Defence & Space et Thales Alenia Space) et institutionnels (CNES, Commandement de l’Espace).
Implantation régionale des entreprises du NewSpace français en 2023
3. Quelle actualité pour le NewSpace français en 2023 ?
Au-delà de régulières annonces de contrats ou de partenariats (dont il convient de relever qu’une part croissante concerne la scène internationale), voici les trois développements clefs qui, selon Toulouse Space Team, marquent l’actualité du NewSpace hexagonal en ces premiers mois de 2023 :
Des levées de fonds en progression constante
Les dernières années auront incontestablement marqué une forte progression des levées de fonds (quelle qu’en soit la nature) pour le NewSpace français, capitalisant désormais à plein d’un cadre de facilitation particulièrement porteur. Ainsi, pas moins de 422 millions d’euros auront été levés au cours des cinq années écoulées par les acteurs du NewSpace hexagonal. Un chiffre d’autant plus significatif que les années 2020 et 2021 auront été fortement impactées par la crise sanitaire liée au Covid-19. Cette dynamique s’est d’ailleurs poursuivie durant le premier trimestre 2023, comme en attestent les récentes levées de fonds annoncées par Exotrail (54 M€) et The Exploration Company (40 M€).
Les Assises du New Space : une réelle dynamique d’écosystème appelée à durer
Les Assises du New Space, dont la première édition s’est tenue les 7 et 8 juillet 2022, avaient pour objectif de rassembler tous les acteurs du spatial pour propulser le NewSpace de demain. L’enjeu de ces assises était double : consolider et structurer le NewSpace français pour le faire rayonner à l’international d’ici cinq ans. Cette première édition aura selon nous marqué la fin d’une opposition entre grands groupes et start-ups pour créer un seul et même collectif du secteur spatial national destiné à capitaliser à plein sur les nouvelles opportunités générées par les activités du NewSpace.
Le collectif des Assises a publié à l’automne 2022 le rapport « Ambition NewSpace 2027 ». Pas moins de six grands enjeux structurants (le financement, les clients, la mondialisation, l’opinion publique, l’indépendance stratégique et l’intelligence) pour l’avenir du NewSpace français, assortis de 24 propositions, émanent de ce rapport, aboutissement d’un processus participatif piloté par le collectif sur une période de 12 mois. Un bilan sera dressé lors de la seconde édition des Assises du NewSpace, prévue en juillet 2023. De toute évidence, l’écosystème du NewSpace français tient là une véritable plateforme fédératrice qui nous semble armée pour s’inscrire dans la durée.
Iris2, le nouveau projet européen d'Internet par satellite, sera réalisé à 30 % par des start-ups
Le 18 novembre 2022, l’Europe, par le biais de son Commissaire à l’Industrie et à l’Espace, a annoncé la création d’Iris2, une constellation de satellites multi-orbites ayant pour objectif de sécuriser Internet et ses communications sur le territoire européen. Censée être opérationnelle dès 2027, Iris2 est, après Galileo et Copernicus, la troisième constellation du portefeuille européen d’infrastructures spatiales stratégiques.
Evalué à 6 milliards d’euros, ce projet colossal sera en partie financé par le budget de l’Union Européenne (à hauteur de 2,4 milliards d’euros, provenant notamment du fonds Horizon Europe), l’Agence Spatiale Européenne (750 millions d’euros) et le secteur privé. La Direction générale de l’industrie de la défense et de l’espace, qui vient de lancer en mars 2023 les premiers appels d’offres, prévoit que 30% de la conception de la future infrastructure soient réservés aux start-ups. L’occasion pour les pépites de demain de mettre leur savoir-faire au service des acteurs historiques du spatial et des télécommunications satellitaires que sont Airbus Defence & Space et Thales Alenia Space.
Les cinq indicateurs clefs du NewSpace français selon Toulouse Space Team
Tout visuel de cet article est réutilisable sous réserve de ne pas le modifier, et de le publier dans son intégralité, et de citer la source.
Tout ou partie de l’analyse est réutilisable sous réserve de ne pas modifier le sens, et de citer la source.
